Michaël Sellam (Chahine Capital) : « L’IA n’est pas un argument marketing, c’est une réalité »4 min read
Pionnière de la gestion « Quantitative Momentum », la société de gestion Chahine Capital a toujours misé sur l’innovation. C’est désormais vers l’intelligence artificielle que l’entreprise se tourne pour « conserver ce temps d’avance ». Michaël Sellam, président de Chahine Capital, nous en dit plus sur les avancées de sa société en la matière.
Chahine Capital se définit comme une société de gestion experte en « performance engineering ». Qu’entendez-vous par « performance engineering » ?
L’activité première de Chahine Capital est de gérer la Sicav Digital Funds qui regroupe des fonds totalement investis en actions et dont l’objectif est de surperformer les marchés européens. Pour ce faire, nous exploitons des modèles quantitatifs propriétaires dont l’objectif est de délivrer une performance remarquable, ce qui est le cas depuis plus de 21 ans !
Ils sont mis en œuvre par une équipe d’experts spécialistes de la finance, tous ingénieurs de formation, dont les travaux visent à concevoir, appliquer et améliorer en permanence ces modèles, avec une approche scientifique très différenciante.
La finance, c’est davantage une question d’hommes que de technologie, non ? Quelle place occupe l’humain dans la prise de décision ?
Avant de vous répondre, il n’est pas inutile de rappeler que la finalité première de la finance est d’allouer les ressources d’épargne disponibles aux entreprises, collectivités d’hommes et de femmes qui vivent du travail qu’ils apportent à ces entreprises.
La gestion financière, quant à elle, distingue généralement deux approches : la gestion fondamentale et la gestion quantitative. Cette dernière exploite des modèles, conçus et mis en œuvre par des intelligences humaines, qui comprennent eux-mêmes deux grandes catégories : ceux qui exploitent des données fondamentales, telles que les prévisions de bénéfice des sociétés, et ceux, comme les nôtres, qui cherchent à tirer parti de biais humains comportementaux.
En fait, la gestion quantitative, telle que nous la mettons en œuvre, conserve une forte dimension humaine. C’est notre expérience collective dans l’investissement en actions que nous avons modélisée. La technologie n’est qu’un outil puissant au service de notre vision des mécanismes de marché.
Pourquoi avoir choisi d’intégrer de l’intelligence artificielle dans votre gestion ? Et quelle utilisation en faites-vous ?
Notre recherche nous a montré que l’intelligence artificielle pouvait favoriser sensiblement la performance de nos fonds par l’utilisation de modèles plus sophistiqués. Nous avons alors élaboré un modèle de deep learning qui a permis effectivement d’optimiser l’utilisation des données que nous traitons, ce qui s’est traduit par une augmentation des performances de ces fonds.
Concrètement, nous avons utilisé des réseaux de neurones artificiels pour noter tous les titres de notre univers d’investissement (plus de 1 700), ces notes guidant les décisions d’achat ou de vente des quelque 140 titres qui composent chacun de nos fonds.
Chahine Capital utilise-t-il réellement de l’IA au quotidien ou est-ce surtout un argument marketing, comme c’est le cas de nombreuses entreprises ?
C’est bien plus qu’un argument marketing : c’est une réalité. Nos modèles utilisaient traditionnellement deux « moteurs », l’un basé sur l’analyse du momentum de cours, et l’autre basé sur l’analyse du momentum de révisions de bénéfices.
Depuis le mois d’octobre dernier, nous leur avons intégré un troisième moteur basé sur l’IA. Et à notre grande satisfaction, grâce à sa capacité de détection plus précoce des titres les plus prometteurs, c’est celui qui a le mieux performé !
Il est cependant vrai que la dimension marketing n’est pas absente de notre réflexion dans la mesure où depuis toujours nous attachons une immense importance à la transparence de nos process de gestion. Ce qui nous amène à analyser en permanence, pour les comprendre, les orientations prises par le moteur d’IA. Ce « décryptage », facilité par le fait que les data qu’il traite sont les mêmes que celles des deux autres moteurs, nous permet d’offrir toute la transparence voulue à nos investisseurs.
Dans les années à venir, l’IA est-elle amenée à occuper une place grandissante chez Chahine Capital ?
Sans aucun doute. Les premiers pas sont plus qu’encourageants et notre équipe de gestion y voit avec excitation de nouveaux territoires de recherche.
Êtes-vous en avance sur la concurrence en matière d’innovation ?
Chahine Capital a été pionnière en Europe de la gestion quantitative Momentum actions. Avec l’intégration de l’IA dans ce type de gestion, nous nous inscrivons dans cette lignée. Mais nous ne doutons pas que cet outil sera de plus en plus appréhendé par nos confrères. Ce qui nous fait obligation d’approfondir avec pugnacité notre recherche pour avoir toujours ce temps d’avance qui est, pour employer en l’espèce un terme très marketing mais si adapté, dans notre ADN.